mercredi 30 juillet 2014

Les causes multiples et les enchaînements d’extinction

De nombreuses causes, directes ou plus insidieuses, sont à l’origine de l’érosion de la biodiversité. L’augmentation de la population humaine et de la consommation des ressources a entraîné la destruction des milieux naturels et la surexploitation de nombreuses espèces sauvages. À cela s’ajoutent aujourd’hui les conséquences de la pollution, du réchauffement de la planète et de l’introduction par l’homme d’espèces exotiques envahissantes.

Pour de plus en plus d’espèces, leur disparition est aujourd’hui due à plusieurs facteurs, souvent mal connus et dont les effets se multiplient. C’est le cas d’amphibiens qui ont disparu récemment à cause de plusieurs raisons (champignon, maladies, changements climatiques, altération de l’habitat, etc.) qui se potentialisent.

Ce nouveau type d’extinction, du à des causes plurifactorielles, montrent que les problèmes sont de plus en plus complexes et difficiles à résoudre. D’autres espèces dépendent les unes des autres et peuvent disparaître en cascade quand la première s’éteint.

La dégradation des milieux naturels

La cause majeure d’érosion de la biodiversité est la transformation de l’usage des terres par les activités humaines, et donc la destruction, la dégradation, l’altération ou la fragmentation des habitats de nombreuses espèces animales et végétales. Cela est du à l’impact des activités agricoles (culture, élevage et plantations de bois), des industries d’extraction (mines, pêcheries, coupes forestières et cueillettes), et du développement humain, des transports et de l’urbanisation. Aujourd’hui les écosystèmes agricoles couvrent plus du quart de la surface des terres émergées (et cela atteint 50 % en Europe). Près de la moitié de la surface forestière originelle a été détruite.

La pollution des sols, de l’eau et de l’atmosphère accentue la dégradation des milieux naturels et affecte directement certaines espèces. Ainsi, à cause de la pollution, 40 à 50 % des espèces de champignons ont disparu en 60 ans en Allemagne, en Autriche et aux Pays-Bas. Beaucoup d’espèces d’insectes se sont raréfiées dans les campagnes françaises, affectant toute la chaîne alimentaire, et en particulier les oiseaux insectivores et les chauves-souris.


La dégradation des milieux naturels (et la disparition des habitats) est la première menace pour les oiseaux (89 % des espèces d’oiseaux menacés affectés), les mammifères (83 %) et les plantes (91 %)

« 50 % de la surface de la terre a été modifié par l’usage de l’homme, et il n’existe plus de territoires véritablement vierges. »

Espèces en danger ou disparues

La liste des espèces disparues ou menacées d’extinction ressemble à une longue énumération à la Prévert. Thylacine, grand pingouin, couagga, baleine à bosse, tigre de Sibérie, vison d’Europe, poisson-chat géant du Mékong, discoglosse peint de Palestine, escargots du genre Partula en Polynésie, autant de noms étranges, expression de la diversité de la vie.

Derrière cette longue liste de noms plus ou moins familiers, se cachent une tendance et une réalité scientifique inquiétante. À cause des activités humaines, dans tous les pays du monde, sous les tropiques ou dans nos forêts, des espèces animales et végétales disparaissent. La toile de la vie se défait. L’uniformité remplace la variété, la dominance la diversité. La nature aussi se mondialise et s’appauvrit… Et la disparition d’une espèce est définitive.

« Les scientifiques estiment que 25 000 à 50 000 espèces disparaîtraient chaque année ».


Notre millénaire, la 6ème vague d’extinction

D’après les scientifiques, nous vivons aujourd’hui la 6ème vague d'extinction (ou peut-être la 7ème…), suite à 5 crises biologiques majeures (il y a 440, 365, 250, 145 et 65 millions d'années). Celle d’il y a 65 millions d'années (au début de l’ère tertiaire, et qui serait due à une pluie de météorites géantes au Mexique) aurait entraîné la disparition des dinosaures (au moins 850 espèces), de groupes de mollusques et de reptiles marins, et en tout de 65 à 70 % des espèces vivant sur la planète. La plus importante (250 millions d'années, crise du Permien), aurait éradiqué 90 % des espèces marines et 50 % des familles d’animaux. Toutes ces crises, dues à des catastrophes physiques, ont permis à d’autres formes de vie de s’épanouir.

La crise contemporaine de la biodiversité, très différente, est due à l’action d’une seule espèce, l’homme.
La nature évolue à un rythme beaucoup trop lent pour rattraper le saccage perpétré par les humains. Les extinctions actuelles, causées par des facteurs anthropiques, risquent de diminuer la biodiversité sur la planète pour des millions d’années à venir, car le nombre de niches écologiques a, lui aussi, été réduit. Il faudrait à la nature au moins 10 millions d’années pour se remettre.

« Tous les biologistes qui travaillent sur la biodiversité sont d'accord pour dire que, si nous continuons à détruire certains environnements naturels, nous aurons éliminé la moitié, ou davantage, des plantes et des animaux de la planète à la fin du 21ème siècle. »
Edward O. Wilson, Professeur à Harvard.


La tendances !

À la différence du changement climatique, qui est un phénomène global, la crise de la biodiversité se traduit par une multitude d’événements locaux. Cela augmente la complexité du phénomène et le rend plus difficile à appréhender dans sa globalité par les scientifiques.

Il est difficile de prédire l’importance des extinctions à venir, vu notre méconnaissance du monde vivant et du nombre d’espèces existant sur la planète. Beaucoup d’espèces s’éteignent avant même d’être connues. Mais pour des groupes d’espèces bien connus comme les mammifères, les oiseaux, ou les conifères, et dont le statut de conservation a été évalué de façon exhaustive, le pourcentage d’espèces menacées varie de 10 % à 30 %, voire même plus de 50 % (cas des tortues, par exemple). Mais ce qui est une certitude, c’est que l’érosion de la biodiversité touche aujourd’hui la nature ordinaire, tout autour de nous.

Si la tendance se confirme, 50 % des espèces vivantes pourraient disparaître d’ici à 2050.


Un réseau d’espaces naturels protégés insuffisant

Les parcs nationaux protègent 2,3 % du territoire métropolitain, les réserves naturelles 0,4 % et les arrêtés de biotopes 0,2 %. Les standards internationaux recommandent pourtant qu’au minimum 10 % du territoire de chaque pays soit protégé pour assurer le maintien de la biodiversité. Et à titre de comparaison, les réseaux et les infrastructures routières couvrent plus de 3 % du territoire national. Les 44 Parcs Naturels Régionaux représentent quant à eux environ 15 % du territoire Mais trop souvent la biodiversité est insuffisamment prise en compte par rapport aux impératifs économiques ou touristiques. La France fait aujourd’hui figure de mauvais élève à l’école de la biodiversité.

De nouveaux territoires pour la biodiversité ?

Suite à l’arrêt des persécutions et de l’usage massif des pesticides (et des organochlorés en particulier), les populations de nombreux rapaces se sont reconstitués en France. La déprise agricole, la prise de conscience des pouvoirs public et la législation en faveur de la protection de l’environnement, l’évolution de la perception de la nature, le travail de nombreuses associations de protection de la nature ont permis le retour de certaines espèces.

Une conception nouvelle de l’aménagement du territoire, l’importance économique des loisirs verts, l’intérêt pour la nature des français laissent espérer que nous pourrons relever de nouveaux défis en France, avec une valorisation de nos territoires, basés sur le respect du patrimoine naturel. Le débat actuel sur l’acceptation sociale du retour des grands carnivores illustre bien le changement des mentalités. Pourquoi ne pas imaginer demain des territoires de nature peuplés de grands ongulés sauvages comme le bison d’Europe ou le cheval de Przewalski, et de grands carnivores ?

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