Compte
tenu de l'importance de sa surface forestière, la France dispose, par
rapport à ses voisins européens, d'une incontestable richesse... qu'elle
dilapide en l'absence d'un vrai projet forestier. "On ne cesse de se plaindre de ne pas avoir de ressources en matières premières, on en a une sous nos yeux et on la sous-exploite", soulignait le Président de la République, le 19 mai 2009, dans son discours sur la filière bois.
Néanmoins,
notre pays est aujourd'hui incapable de valoriser ce patrimoine, encore
moins de le pérenniser, alors que le bois fait partie des enjeux de
demain sur les plans économiques et écologiques.
- Une demande en résineux non satisfaite
Le seul recours à la régénération
naturelle, dans un contexte d'effondrement des plantations forestières
depuis plusieurs décennies, ne permettra pas de faire face aux enjeux
d'approvisionnement en bois à partir de 2030.
La pénurie en résineux frappe déjà
d'ailleurs l'hexagone, alors que la filière bois puise actuellement dans
les ressources plantées à l'époque du Fonds Forestier National
(structure créée en 1947 et supprimée en 1997). Depuis la suppression du
FFN, les surfaces exploitées sont souvent restées livrées à
elles-mêmes, ne faisant l'objet d'aucun reboisement. Du coup, certaines
régions, comme la Bourgogne, savent déjà qu'elles manqueront de bois
(Douglas par exemple) d'ici une vingtaine d'années et cherchent à
anticiper ce manque à gagner en préconisant des rotations très longues.
L’enjeu en vaut-il la chandelle pour des propriétaires forestiers qui
risquent fort d'être confrontés au cours des prochaines années à de
nouvelles tempêtes et aux changements climatiques ? Un étalement dans le
temps qui ne permettra pas pour autant de combler le trou de production
annoncé...
- Des plantations forestières divisées par 4 en 15 ans
En
15 ans, la quantité de plants forestiers plantés est effectivement
passée de 110 millions à 28 millions par an (hors pin maritime). Ainsi, plus de la moitié des ventes de plants forestiers en 2009 (59 millions de plants - Source Cemagref)
provient du pin maritime (29 millions de plants vendus), la plantation
se substituant au semis pratiqué auparavant. Cette progression des
ventes des plants de pin maritime (liée
également à l'impact de la tempête de 1999 qui a dévasté le massif
aquitain dont la surface de production n'a pas évolué) masque la baisse
dramatique des ventes de plants forestiers.
Pour
dynamiser la filière bois en France, il est donc indispensable
d'accroître la production en résineux réclamés par l'industrie,
notamment en ce qui concerne le bois d'œuvre.
- Des essences peu valorisables, des générations futures oubliées
Le
niveau actuel du reboisement est d'autant plus insuffisant que, sur les
525 000 ha ravagés par la tempête de 1999, seuls 150 000 ha ont été
reconstitués. 30 % seulement ont été remis en production ! Et
ce malgré l'envergure des subventions reçues de l'Union européenne (915
ME). Cent millions d'euros n'ont même pas été utilisés.
Que
sont devenues les surfaces non reconstituées ? Là encore, bien souvent,
elles se sont transformées « naturellement » en taillis ou en
« fouillis » forestiers, peu exploitables. En témoigne l'exemple de la
reconstitution de la forêt de Haguenau, évoquée dans le hors-série
Arbres et forêts de Terre Sauvage (Collection nature, automne
2009), réalisé en collaboration avec l'ONF : 80 % de la reconstitution
est réalisée avec des essences peu valorisables (cerisier tardif =
peste végétale, bouleau = bois énergie...).
- Incohérence avec le Grenelle de l'environnement
Le Grenelle de l'environnement a mis en valeur l'intérêt du bois comme éco-matériau
et la nécessité d'augmenter l'exploitation des ressources forestières
françaises. Ainsi, les pouvoirs publics prévoient une augmentation de la
récolte en bois de 12 millions de m3 en 2012, soit une hausse de 30 % par rapport au niveau actuel, et de 20 millions de m3 en 2020. Cette évolution doit jouer notamment en faveur du bois énergie mais aussi du bois d'œuvre.
L'utilisation
du bois dans la construction doit ainsi être multipliée par dix :
ossature, charpente, menuiseries intérieures ou extérieures, revêtements
de façade, de sol ou de mur... En France, ce secteur constitue déjà le
principal débouché actuel et potentiel du bois et des produits à base de
bois (plus de 60 %), taux qui s'élève à près de 80 % pour les résineux
dont les caractéristiques (plus légers et meilleure résistance
longitudinale) conviennent mieux que le feuillu à la construction. Selon
une étude réalisée dans le cadre de la neuvième édition du salon Maison
Bois d’Angers, 15 % du marché de la construction en 2015 serait détenu
par la maison en bois, soit 30 000 maisons. Ce n'est qu'un début.
Néanmoins, les ressources forestières françaises sont d'ores et déjà
inadaptées. 90 % des bois utilisés pour la maison à ossature bois
proviennent d'Europe du nord.
«Aujourd'hui, on importe pour 3 millions de m3 de sciage de résineux. L'industrie française manque déjà vraisemblablement de 4 à 5 millions de m3 de résineux. On ne les trouvera qu'en faisant des plantations » précise Laurent Denormandie président de la Fédération nationale du bois.
Par
ailleurs, il s'agira de faire face à la reprise de l'activité de
certains secteurs de l'industrie du bois, actuellement en pleine crise
(papeterie, emballage...)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire